Méditation pour Vendredi Saint (10 avril 2020)
Méditation du Vendredi Saint 10 avril 2020
« Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » Mc 15, 34
À midi l’obscurité se fit sur la terre, elle dura jusqu’à trois heures … précisent les Evangiles.
Trou noir. Ne reste plus que le doute, plus que l’absence et l’abandon.
Effondrement de tout sens. Les propos de la raison ne sont plus d’aucun secours.
Et une parole désespérée du Christ, une citation du Ps 22, vient rompre le silence. Quelqu’un, plusieurs siècles avant Jésus, avait connu l’angoisse et écrit ces lignes. Et sur la Croix, Jésus se les approprie.
Au cœur de la vie avec Dieu, même pour le Fils, surgit une douloureuse incompréhension : où est Dieu ? Que fait-il ? Comment ne pas se sentir abandonné ?
Tant de femmes et d’hommes de par le monde vivent ce gouffre.
Peut-être que nous avons dû, nous aussi, affronter ces terres hostiles.
Partager la même angoisse. Malgré la foi. Et trouver toutes paroles creuses. Aucune réponse possible, moins encore d’explications.
Et là, encore et toujours, le Christ est « avec nous ».
Dans ces moments-là, pour ceux que nous aimons et qui sont dans la désolation, se souvenir que Jésus lui-même a ressenti un tel désarroi est important. Juste être là, ensemble, avec des mots simples. Sans chercher à expliquer, ni à consoler à bon marché. En constatant simplement que Jésus continue à s’adresser à Dieu… obstinément, même quand il ne comprend plus.
« J’ai soif. » Jean 19, 28
La parole la plus courte du Christ en Croix. Elle vient redire une fois encore son humanité. Comme n’importe être humain sur le point de quitter la vie, il demande très simplement de quoi humecter la sécheresse de sa bouche et d’être ainsi quelque peu apaisé.
Et les soldats, dans un geste universel, lui donnent ce vin vinaigré et coupé qui soulageait quelque peu les crucifiés. Un instant d’humanité au milieu d’une exécution sordide.
Luc 23
C’était déjà presque midi et il y eut des ténèbres sur toute la terre jusqu’à trois heures…
… Jésus poussa un grand cri ; il dit : « Père, entre tes mains, je remets mon esprit. » Et, sur ces mots, il expira.
Tiré du psaume 30 (verset 6), cette dernière parole du Christ est l’expression d’une immense confiance. Dans ce même psaume, Dieu est tout à la fois refuge, roc et forteresse. A l’ultime seconde de sa vie le Christ sait son père plus fort que l’injustice et la violence qui se sont abattues sur lui, plus fort que la mort elle-même qui ne pourra l’engloutir définitivement.
Et que dire de plus, si ce n’est rester dans le silence.
Ou peut-être juste ajouter ceci. Dans cette ultime parole de confiance et d’abandon à la bonté de Dieu, le Christ nous confie toutes et tous à l’amour du Père. En restant avec nous et nous avec lui, il nous ouvre un chemin. Il nous invite à remettre au Père nos craintes et nos joies, nos accablements et nos enthousiasmes, notre présent et notre avenir, notre vie entière.
Christophe Reymond, avril 2020
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